" Eastern Boys " Actor's Studio

Réalisateur : Robin Campillo.

Acteurs : Olivier Rabourdin, Kirill Emelyanov, Danil Vorobyev.

2013

Mostra de Venise 2013 : Prix du meilleur film catégorie Horizons.

Appréciation personnelle : ***

Le cinéaste joue habilement du politiquement incorrect en nous livrant une histoire très moderne et bien installée dans notre temps en nous renvoyant à notre propre solitude, à nos propres noirceurs vécues ou non !, à nos fantasmes, à nos propres zones cachées. Fable sociale, fable romanesque mais cruelle amorçant un virage vers le thriller en seconde partie, un regard franc sur notre société et sur nos rapports les uns aux autres.

Format minimaliste, belle photo, le film s'ouvre sur une scène particulièrement réussie. La caméra, aérienne et fluide, balaie la gare du Nord à Paris, où oeuvre la bande d'immigrés de l'Est. La gare et son espace, filmés comme une grande scène de théâtre où les garçons évoluent, souples, animaux, danseurs, habiles dans leurs déplacements, à l'affût du moindre vol à faire, l'oeil aux aguets de toute proie facile ou de tout danger à déjouer !

C'est là que Daniel rencontre Marek. Faut-il croire que Daniel soit si déprimé - ou aime-t-il côtoyer le danger - pour qu'il drague le jeune homme en se doutant de qui il est, et, après quelques hésitations, pour lui donner son adresse et accepter le rendez-vous pour le lendemain !

Et c'est là que Daniel tombe dans le piège, car ce n'est pas le seul Marek qui débarque dans son appartement mais la bande de potes avec à leur tête, Boss, charismatique et autoritaire, ce qui donne une scène, peut-être un peu longue mais hallucinante, de saccage d'appart et de jeu du chat avec la souris, et particulièrement réussie !

Sous la cruauté, la tendresse ! Daniel et Marek entreprennent une relation tarifiée, cachée aux autres, Marek y trouvant une sorte de sécurité et d'équilibre. Daniel parvient à l'affranchir de la bande, non sans mal, et, par désir de le garder dans sa vie, lui propose une relation sur la durée qui n'est pas celle que l'on pourrait croire !

La caméra se fait tendre et pudique pour les quelques scènes de sexe, preuve que l'on peut filmer une scène de lit sans devoir tout montrer ("La vie d'Adèle" d'Abdellatif Kechiche", éprouvantes scènes de sexe faisant du spectateur un réel voyeur et finalement très gênantes et pas nécessaires !).

Un peu plus court, le film aurait gagné en intensité.

Un peu gêné par le jeu monolithique d'Olivier Rabourdin, au demeurant bel homme, entre fragilité et virilité, le jeune Kirill Emelyanov touchant dans le rôle de Marek, et il faut surtout signaler l'interprétation de Daniel Vorobyev dans le rôle du Boss ! Brillant ! Manipulateur, égocentrique, dominateur, il crève l'écran !