" La Storia " d' Elsa Morante

" Un jour de janvier de l'an 1941, un soldat allemand, jouissant d'un après-midi de liberté, se trouvait seul, en train de flâner dans le quartier de San Lorenzo, à Rome. Il était environ deux heures de l'après-midi, et à cette heure-là, comme d'habitude, peu de gens circulaient dans les rues. Aucun des passants, d'ailleurs, ne regardait ce soldat, car les allemands, bien que camarades des Italiens dans la présente guerre mondiale, n'étaient pas populaires dans certaines banlieues prolétaires. Et ce soldat ne se distinguait pas des autres de la même série : grand, blond, avec l'habituel comportement de fanatisme disciplinaire et avec, en particulier dans la position de son calot, l'expression provocante correspondante. Naturellement, pour quelqu'un qui se serait mis à l'observer, il ne lui manquait pas quelques détails caractéristiques. Par exemple, en contraste avec son allure martiale, il avait un regard désespéré. Une incroyable absence de maturité se lisait sur son visage, alors que de taille il devait mesurer plus ou moins 1,85 mètre. Et son uniforme - chose vraiment comique pour un militaire du Reich, particulièrement à ces premiers temps de la guerre - quoique neuf et bien ajusté sur son corps maigre, état trop court de taille et de manches, laissant à nu ses poignets frustres, gros et ingénus, des poignets de petit paysan ou de plébéiens. " 

Paru en livre de Poche - ou reparu je ne sais ! -  c'était l'occasion de lire l'un des chefs-d'oeuvre de la littératire italienne d'autant plus que je n'avais rien lu  d'Elsa Morante alors que j'avais beaucoup lu d'Alberto Moravia, son mari pendant près de vingt ans et dont elle ne divorca pas !

Un livre au retentissement international qui créa la polémique à l'époque, je ne sais pour quelle raison, peut-être une description trop pointue de la société italienne des quartiers défavorisés pendant les années de guerre, à la façon du néoralisme et aussi sans doute de la sympathie éprouvée par certains pour le nazisme et de la "lâcheté des notables romains concernant la question juive ".

Un roman de plus de 900 pages qui se lit sans aucune lassitude même si je me dis qu'une telle histoire aurait pu être écrite en moins de pages mais l'auteure partageait avec son compagnon l'art de savoir raconter une histoire et de ne pas vous faire lâcher prise !

C'est une fresque historique et un portrait de femme perdue dans "les horreurs de la guerre, cet interminable assassinat " ! Un souffle réel qui vous potre !

Ida, trente-huit ans, institutrice, se fait violer par un soldat allemand ivre. Veuve et déjà mère d'un garçon presque ado, elle accouchera du petit Useppe, dont elle devra assurer la survie et le protéger d'une sensibilité et d'une fragilité peu en adéquation avec l'environnement cruel .

Useppe se forgera son petit monde à lui porté par son amour et son admiration pour son demi-frère Nino et pour l'ami de celui-ci, David, sans oublier sa complice la plus proche et sa protectrice, la chienne Bella !

" Useppe est un enfant precoce, joyeux et aimant le monde. Mais peu à peu, cette joie de vivre va se transformer en tristesse. Issu d'une rencontre absurde provoquée et aneantie par l'Histoire, un enfant est venu au monde et n'y trouve pas sa place." (Allociné)

De ce livre, Luigi Commencini en fit un film en 1986 avec Claudia Cardnale, Lambert Wilson et Francesco Rabal.